Pour parvenir à relever le défi climatique, plusieurs changements doivent s’opérer. Des lois, des politiques publiques, des infrastructures, des technologies… même le code du bâtiment doit être adapté. Parallèlement à ces grands chantiers, d’autres éléments peuvent être modifiés, à échelle humaine. Il s’agit de nos comportements.
Mais attention, bien que ces changements reposent sur les individus, sur des décisions personnelles, sur des actions du quotidien, il ne s’agit pas pour autant d’un petit défi. En effet, implanter de nouvelles habitudes chez les gens est un processus complexe. Assez complexe pour avoir été étudié par des chercheurs en psychologie, en économie et en sociologie. Pour y voir plus clair, nous avons questionné Claudia Laviolette, conseillère en mobilisation collective et innovation sociale dans notre équipe et candidate au doctorat en sociologie de l’alimentation.
« Les gens sont souvent coincés dans leurs habitudes », nous lance-t-elle d’entrée de jeu. « Leur expliquer, par exemple, que la viande et les produits laitiers sont responsables de presque 50 % des émissions de GES liées à l’alimentation n’est pas suffisant. »
Vous l’aurez compris, Claudia étudie la consommation de protéines alternatives à la viande. Elle nous a expliqué que nos habitudes sont souvent ancrées dans les croyances, les valeurs et les normes sociales, lesquelles sont généralement acquises durant notre processus de socialisation. Et les structures (sociales et autres), une fois créées, résistent généralement au changement.
Au sein de ses travaux de recherche, Claudia tente de découvrir comment faire évoluer les valeurs et les croyances « parce que les structures qui motivent les choix sont souvent intériorisées par les individus. On a tendance à l’oublier ». Par exemple, dans le cas présent, une personne peut objectivement savoir que la production de protéines animales contribue à la crise climatique, mais avoir la conviction que manger de la viande est essentiel à sa santé. « Ce n’est pas parce qu’on met en place une structure externe à l’individu [par exemple, une option végétarienne sur le menu] qu’il va nécessairement l’adopter. »
Alors, comment faire?
Pour trouver des éléments de réponse, Claudia s’est lancée dans l’étude des représentations sociales des protéines alternatives sur Instagram. Elle a découvert deux grandes tendances au sein des publications qui font la promotion des protéines alternatives. D’une part, il existe une approche de confrontation. On y traite des dangers de la viande sur la santé, de maltraitance animale, de l’impact des élevages intensifs sur la biodiversité et le climat, etc.
D’autre part, on trouve des publications qui tentent d’ancrer les protéines alternatives dans les pratiques alimentaires quotidiennes des consommateurs. On y vante leur goût ou leur polyvalence. Idées de recettes, astuces, bienfaits, tout y est pour expliquer comment remplacer la viande par d’autres sources de protéines tout en obtenant la même satisfaction.
Selon Claudia, les deux approches sont nécessaires pour arriver à changer les comportements, mais sans tomber dans le sensationnalisme.
« Il faut cultiver de nouvelles pratiques à partir de nouvelles connaissances, d’expériences de partage et de réflexion pour éventuellement prendre une décision. Ensuite, la personne se donne une nouvelle habitude, une nouvelle structure, pour normaliser son nouveau comportement. Tout passe par la décision. Et une fois que tu as décidé de changer, ça prend de l’aide pour apprendre des nouvelles façons de faire qui vont permettre de redéfinir tes comportements ».
Dans notre exemple, ce sont les recettes, les trucs et les astuces pour remplacer la viande qui aident la personne à apprendre de nouvelles techniques de cuisine. Quand il est question de convaincre une population d’utiliser le transport en commun, de faire réparer ses vêtements ou de rapporter ses contenants consignés, les mêmes mécanismes entrent en jeu : sensibilisation, information, soutien.
Et le soutien peut passer par des changements dans la norme sociale (pensons à une époque pas si lointaine où c’était normal de jeter son huile à moteur dans le fond de sa cour) ou par une modification de l’environnement physique, comme de rendre disponibles des supports à vélos ou d’ajouter des pistes cyclables. Ces éléments aident à ancrer la nouvelle habitude.
Notre accompagnement en changements de comportements
En terminant, bien que Claudia n’ait rejoint l’équipe du FAQDD que depuis quelques mois, la théorie du changement de comportements fait partie de l’ADN de l’organisation depuis sa création, il y a bientôt 25 ans. Un mémoire sur le sujet est d’ailleurs disponible dans la section Publications de notre site Web, pour ceux et celles qui voudraient aller plus loin.
Sinon, les demandeurs et les porteurs de projets d’Action-Climat Québec et de l’Accélérateur de la transition écologique dont les démarches s’inscrivent dans les changements de comportements (changement d’habitude de consommation, adoption d’un mode de transport alternatif, consommation alimentaire) ont la chance d’être accompagnés par Claudia dans la préparation de leurs demandes et le déploiement de leurs projets.
Cet automne, elle offrira d’ailleurs un webinaire au sujet des changements de comportements aux organisations qui réalisent actuellement des projets dans le cadre de l’Accélérateur. Vous les trouvez chanceux? Nous aussi!